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Témoignage de Philippe Daussin

Philippe DaussinTémoignage

D’où je viens ?

Beaucoup de ceux qui me connaissent voient en moi le Philippe amusant et qui a toujours une blague à raconter. Il paraît que, bien souvent, la dérision sert à cacher des blessures, des blessures qui peuvent remonter à notre enfance. Pour ceux qui ne le savent pas, je suis l’aîné de huit enfants. Nous ne sommes que trois du même père. Nous vivions à Châlons-sur-Saône. Un soir de janvier 1962, alors que je n’avais pas quatre ans, ma mère a quitté mon père et nous sommes partis vivre à Paris, dans une minuscule chambre de bonne sous les toits. La journée, elle travaillait dans un atelier de fourrure. Puis en juin, mon frère Gilles est né.

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À l’été 1963, Christine, Gilles et moi, avons été retirés à notre mère pour être placés à l’institut Saint Vincent de Paul (la DASS). Là-bas, on nous a dépouillés de nos vêtements civils, de nos jouets et tout ce qui pouvait rappeler notre famille. Puis on nous a passé une chainette autour du cou avec un numéro pour être enfin « expédiés » en taxi dans la région de Nevers où nous avons été séparés. Mon petit frère et moi, avons été confiés à une dame âgée et veuve. Ma sœur n’était pas descendue du taxi. Il paraît que le lendemain matin de notre arrivée, je me suis sauvé pour suivre le chemin qu’avait emprunté ce taxi. Je voulais retrouver Christine. Je l’ai effectivement retrouvée à deux kilomètres de la maison. Elle jouait dans le jardin d’une ferme. Je n’en n’ai pas le souvenir, mais il paraît que je me serais exclamé en pleurant : Je ne croyais jamais te retrouver, petite sœur. Puis quelques mois plus tard, on m’a rendu à notre mère, probablement parce que j’étais l’aîné.

Malheureusement, quelques temps plus tard, la DASS m’a de nouveau retiré. Moi, mais aussi un nouveau petit frère que ma mère avait eu avec un homme. D’après les services sociaux, elle n’arrivait pas à nous élever correctement. J’ai donc passé une bonne partie de mon enfance en Normandie, dans un internat pour enfants en difficultés familiales ; internat tenu par des sœurs catholiques. Je crois bien que cela a été les pires années de ma vie. Je n’ai jamais vu un signe d’amour chez ces femmes, bien qu’elles en parlassent régulièrement. Des prêtres nous enseignaient le catéchisme, moment que j’appréciais. À partir de là, bien que croyant en Dieu, je ne voulais plus en entendre parler. J’aimais à dire que la religion, c’est comme l’alcool : c’est bien, mais il ne faut pas en abuser. Malgré ce certain cynisme, je reconnais aujourd’hui que Dieu était à chaque fois présent dans ma vie, même si je ne m’en rendais pas forcément compte ou, peut-être qu’au fond de moi, je refusais de l’admettre.

Mes études furent très courtes, car lorsque l’on calcule que six fois zéro font six, en sixième et qu’on a déjà quatorze ans, mieux valait me chercher un travail, d’autant plus qu’à la maison personne ne travaillait. Ma mère et mon nouveau beau-père, avec qui elle aura quatre enfants, étaient victimes de cette dépendance qu’est l’alcoolisme. Souvent le soir, des violentes disputes dévastaient la maison. Je me réfugiais dans ma chambre et dans la lecture où je pouvais « m’évader » de mon milieu. J’ai toujours aimé lire, surtout les romans qui font voyager et qui racontent des histoires d’amitiés entre les personnes. Je pense que cela vient du fait que je n’avais pas beaucoup d’amis, car nous déménagions très souvent et aussi que les voisins ne voulaient pas que leurs enfants fréquentent une famille telle que la nôtre. Souvent je me disais que j’aurais aimé savoir écrire de belles histoires comme celles qui me faisaient rêver. Mais voilà : quand on ne sait pas ce qu’est un C.O.D ou un sujet du verbe, il est préférable de penser à autre chose ! Et puis, j’avais des frères et sœurs à m’occuper !

La rencontre

Les années ont passé. Je me suis marié avec Halina et nous avons eu trois enfants. Fanny, l’aînée, Benoît et notre « petit » dernier : Marty. Je travaillais comme responsable informatique au Ministère de l’Intérieur. Un jour, nous sommes allés à Phœnix, aux États-Unis. Là-bas, nous avons eu l’occasion de visiter une église évangélique où j’ai découvert quelque chose de nouveau, presque incroyable : On pouvait parler de Dieu en étant joyeux et heureux ! Des gens chantaient, le visage rayonnant. Le pasteur a parlé d’un Dieu qui nous aimait, un Dieu vivant. Ce jour là j’ai eu cette réflexion : c’est vraiment dommage qu’il n’y ait pas ce genre d’églises en France.

Dieu a dû entendre, car peu de temps après notre retour, une amie nous a téléphoné pour nous inviter à un concert de Gospel donné par de jeunes étudiants américains. Le concert avait lieu dans une église Pentecôtiste près de Paris. Là, nous avons retrouvé cet esprit aussi fraternel que joyeux et qui nous avait tant interpellés à Phœnix. Nous sommes restés quelques temps au sein de cette assemblée, mais c’était assez loin d’où nous habitions.

Puis un samedi soir, au cours d’une soirée galettes des rois, (Dieu pourvoit à tous nos besoins y compris celui de notre estomac) nous avons rencontré un professeur d’anglais. Nous avons sympathisé et, à la fin de la soirée, il nous a dit être pasteur à… Osny. Je vous laisse imaginer notre surprise. C’est nous qui lui avons demandé si nous pouvions assister au culte du lendemain. Nous avons donc changé d’église, mais pas de Dieu, je vous rassure…

L’appel

Un soir de printemps, au cours d’une soirée d’évangélisation, nous devions porter des badges sur lequel était écrit : je suis… mais pas pratiquant. Pour ma part, j’ai choisi : Je suis Écrivain, mais pas pratiquant. Cette soirée là aussi, Dieu a dû entendre…

Quelques semaines plus tard, la ville d’Osny organisait un concours littéraire ouvert à tous les Onyssois. Je me suis donc inscrit et j’ai écrit deux textes que j’ai déposés discrètement, presque comme un voleur (il y avait plus de 70 candidats). L’attente a commencé…

Entre-temps, le pasteur de l’église que nous fréquentions à l’époque, m’a montré un magazine chrétien « Les nouvelles de La Cause » qui organisait un concours littéraire et dont les œuvres s’adresseraient à un jeune public. L’envie d’y participer me tentait, mais je n’avais aucune référence en matière chrétienne. D’autre part, une nouvelle forme de littérature envahissait les rayons des librairies : les séries « Chairs de poules », les « Fais-moi peur », etc. Je pense que les enfants ont besoin d’avoir d’autres héros que des esprits ou sorciers divers !

Je me suis dit que si j’obtenais une récompense aux concours de la ville d’Osny, je m’inscrirais à celui de La Cause. J’ai prié pour ça et… remporté les deux catégories dans lesquelles j’étais inscrit. Je ne le dis pas par vantardise, mais pour montrer la force des réponses que l’on peut obtenir par la prière. Lorsque j’ai commencé à écrire Gauthier, Corsaire au Service de Sa Majesté, je suis tombé malade. J’ai été hospitalisé pendant la majeure partie de l’été et j’ai subi deux interventions au niveau du cœur. Un soir, c’était le 13 août 1999, j’étais très affaibli et les médecins commençaient à s’inquiéter pour moi. Vers vingt-trois heures, j’ai eu le sentiment d’avoir à faire un choix. Soit, je continuais ici-bas, soit tout s’arrêtait. C’était une impression très désagréable… et qui ne venait pas de Dieu, j’en suis convaincu. J’ai beaucoup prié cette nuit-là et chanté un chant que j’aime beaucoup. Victoire. Je me souviens que j’ai promis à Dieu que si je m’en sortais, je me consacrerais à Lui. Qu’il me donne une mission, je la remplirai du mieux que je pourrais. Le lendemain matin, je n’avais plus de fièvre, à la grande surprise des infirmières et médecins. On m’a retiré progressivement les perfusions et quelques semaines plus tard, j’ai pu rentrer à la maison.

Bien qu’encore très faible physiquement, je continuais à écrire tant bien que mal, demandant à chaque fois à Dieu de me donner la force d’avancer et surtout, que cela soit Son livre. Dieu écoute…

Les pages ont défilé les unes après les autres, sans que j’aie à faire des efforts d’imagination. J’avais l’impression de regarder un film ou de lire l’histoire d’un autre auteur. Quand le manuscrit fut terminé, je l’ai donné à lire à des ados et là, le résultat a été au-delà de mes espérances. Le but me semblait atteint. Restait à savoir ce qu’allait en penser le jeune jury de La Cause et franchement, je n’y croyais pas plus que ça…

J’avais oublié que Dieu veillait. Souvent, le soir, je lui demandais la confirmation, à savoir si je devais persévérer dans l’écriture. J’ai eu la réponse début avril 2000. Gauthier, Corsaire au service de sa Majesté, avait remporté le premier prix dans sa catégorie. Quelques mois plus tard, il obtenait le second prix du meilleur livre francophone pour la jeunesse du magazine suisse L’Avènement.

Depuis, j’ai écrit d’autres romans, toujours pour les ados et je souhaite désormais pouvoir m’employer pleinement à ce que m’a confié Dieu. Pour moi, c’est un immense honneur que de pouvoir le servir de cette manière. Dans la Parole, il est dit : « Et mon Dieu pourvoira à tous vos besoins selon sa richesse, avec gloire, en Jésus-Christ. » Philippiens 4.19

Pourquoi cette ardeur à l’écriture ?

À notre époque, il n’est pas rare d’entendre dire que de nombreux enfants n’aiment pas la lecture. Mais à l’école, les encourage-t-on à lire ? Il arrive que des enseignants, qui appliquent un programme scolaire, ne leur donnent que des extraits de textes à étudier et non des ouvrages entiers. Pour avoir visité des CDI (Centres de documentations et d’informations) dans des collèges, je suis assez étonné de la nature des livres mis à la disposition des enfants. Que de romans dont les héros sont des fantômes, des sorcières, des mutants, etc…

Dans les médias, on entend souvent parler des dangers de la nourriture : vaches folles, moutons contaminés par la fièvre aphteuse, sans parler des produits transgéniques… En revanche, pas un mot sur la nourriture intellectuelle ou spirituelle de nos enfants. Pourtant, elle est toute aussi importante pour notre santé. J’en veux pour preuve, une dépêche de l’AFP : une jeune Berlinoise avait mordu plusieurs personnes dans la rue car elle se prenait pour un vampire. À première vue, cela peut faire sourire ! Ce qu’il faut savoir, c’est que cette jeune femme était fan d’une série télévisée américaine « Buffy contre les vampires ».

Dans les livres que j’écris, mes personnages ne savent ni voler, ni passer des murailles, et encore moins parler avec des morts. Ils ne s’appellent pas Maître de la Mort, Gardien des Ténèbres ou encore tartempion le barbare, mais simplement Gauthier, Pawel, Lambert ou Pierre-Louis. Ce sont des enfants ou adolescents ordinaires, mais qui, à travers les rencontres et aventures qu’ils vivent, deviendront extraordinaires. Les lecteurs peuvent donc tout à fait s’identifier aux personnages.

Je suis persuadé qu’il y a un réel besoin d’avoir une autre littérature auprès de la jeunesse. Les histoires de vampires, mutants et sorciers à répétition dont on les abreuve jusque dans les écoles ne permettent pas à un jeune de trouver le sens des réalités. Peut-être les parents sont-ils vigilants à la nourriture que l’on sert dans l’assiette de leurs enfants, mais en est-il de même pour la nourriture intellectuelle ou spirituelle ? Pour moi, la violence, la drogue, le sexe ou l’individualisme ne sont pas le fruit du hasard mais le résultat d’une éducation sans repères. Il y a un combat à mener dans ce monde…

Quand je suis devant l’ordinateur pour écrire, je demande à Dieu de me guider. À chaque fois, c’est la même chose : j’ai toujours cette impression de suivre le fil d’une histoire et non de l’inventer. Entre-temps, je m’attache beaucoup aux personnages. Quand je tape le mot « Fin », j’éprouve un sentiment de tristesse, comme si je quittais des amis très chers. Que ce soit Gauthier, Pawel ou encore Sarah, je suis très triste de les quitter. Heureusement que je me remets très vite sur une autre histoire !

J’ai parfois des retours de mes lecteurs. J’ai appris que l’un d’eux s’était converti en lisant Gauthier, Corsaire… et qu’il avait étudié à la Faculté de Théologie de Vaux-sur-Seine.

Un autre m’avait écrit pour me dire qu’un ami lui avait offert Pawel, ou le faux départ, le jour où il avait décidé de se suicider. Il avait déjà fait plusieurs tentatives. À l’époque, il avait 16 ans et vivait chez sa grand-mère. Ses parents divorcés ne voulaient pas s’occuper de lui. Il a lu le livre d’une traite et c’est le Psaume 23 qui l’a fait renoncer à son geste. À partir de ce jour-là, j’ai vraiment su pourquoi j’écrivais.

Pour revenir à ma sœur Christine et à mon frère Gilles, même si je n’en parlais pas, car c’était un sujet tabou avec ma mère, leur absence me pesait énormément. Un vide immense, comme si une partie de moi manquait. Au fil des années, cette absence devenait de plus en plus pesante. Cela faisait quelques mois que je priais, mais dans ces prières-là, je n’osais même pas demander à Dieu de les retrouver. J’allais avoir 50 ans et peut-être est-ce l’âge où l’on commence à faire le bilan de sa vie, alors je lui disais simplement : le plus beau cadeau que tu pourrais me faire, serait de me permettre de les revoir, ne serait-ce qu’une fois. Dieu est GRAND et le mot généreux trop faible. Il n’a pas attendu le 31 août 2008, jour de mon anniversaire. Le 13 août (première médaille d’or pour les Français aux J.O.), c’est Christine qui me téléphonait après m’avoir vu sur un site Internet « Copains d’avant ». Et le 23 août, on se retrouvait enfin après quarante-cinq années de séparation, pratiquement jour pour jour. Je ne reverrai plus malheureusement mon petit frère, décédé à 26 ans d’une rupture d’anévrisme.

Ce weekend-là, nous avons découvert que nous avions plein de goûts en communs : musique, lecture, voyage, caractère aussi… son mari est d’origine polonaise comme Halina. Ils ont voyagé dans les mêmes endroits que nous et ce, dans les mêmes périodes.

Le dimanche après-midi, nous avons aussi partagé sur la foi. Elle a eu une éducation chrétienne et est restée très croyante (ce qui ne va pas forcément de pair). J’ai pu lui expliquer comment je n’osais pas demander à Dieu de la revoir tellement je trouvais ma prière impossible. Alors, peut-être que comme moi, vous pensez que certaines choses sont impossibles ? Sachez que l’impossible s’obtient par la prière !

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